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Monument aux morts

Après une petite pause dans nos balades niçoises, on y retourne. C’est un lieu incontournable puisqu’il est situé au pied de la colline du Château, entre le port et la vieille ville, face à la mer, Quai Rauba Capeu (chapeau qui vole, c’est là que le vent souffle le plus), le Monument aux morts. Un lieu de mémoire, une porte d’entrée vers l’histoire d’une famille.

Source : AM Nice, Projet Monument du Souvenir, M.Roger Seassal, Premier Prix, 1919, 3 Fi 14-13.

En 1919, la ville de Nice lance un concours d’architectes pour créer un « monument du souvenir » dédié aux 3 655 Niçois morts au combat. Les artistes disposent d’une totale liberté de création, mais l’emplacement est imposé : le monument devra être érigé au pied de la colline du Château, lieu symbolique permettant un recueillement loin du tumulte urbain. Les élus refusent l’idée d’un monument en centre-ville, qu’ils jugent trop banal et inadapté à la douleur des familles. Le jury, composé d’élus, d’artistes et de personnalités du monde des arts, étudie 32 projets exposés au casino municipal. Le 14 août 1919, il retient le projet n°12, « Capeline niçoise sur fond blanc », présenté par l’architecte niçois Roger Séassal, dont la proposition, jugée grandiose et maîtrisée, s’impose par la force de son expression et la qualité de sa conception.

Source : AD06, Plans des monuments aux morts, élévation de la façade, 1923, 2 O 708/2

Le projet de Roger Séassal pose rapidement un problème de financement : malgré loterie, fêtes et souscription publique, les ressources manquent et l’État refuse l’emprunt demandé par la Ville, exigeant un monument moins coûteux. Séassal revoit donc plusieurs fois sa copie et propose en 1923 une version simplifiée mais toujours digne de l’hommage voulu. Grâce à quelques subventions et à un emprunt réduit, les travaux peuvent enfin être engagés. L’adjudication a lieu en juillet 1923, et la première pierre du monument est posée le 11 novembre 1924, lors d’une cérémonie officielle.

Source : AD 06, extrait de L’Eclaireur, n°317, 12/11/1924

Source : AM Nice, Photographies des travaux du Monument aux morts, 3 Fi 14-8

Même si le monument n’est officiellement réceptionné qu’en décembre 1928, son inauguration a lieu plusieurs mois plus tôt, le 29 janvier 1928. Après une messe à la cathédrale Sainte-Réparate, les plus hautes autorités civiles, militaires et religieuses, dont le maréchal Foch, se rassemblent devant le monument pour la cérémonie. Ce matin-là, des familles continuent encore à y déposer les plaques d’identité de leurs proches tombés au combat.

Source : AM Nice, Photographie inauguration du Monument aux morts, 1928, 3 Fi 14-32

Le sculpteur Alfred Janniot joue un rôle essentiel dans la création du Monument aux morts de Nice. Artiste majeur de l’entre-deux-guerres, connu pour son style monumental et épuré, il réalise pour le monument plusieurs bas-reliefs puissants qui évoquent le courage, le sacrifice et la souffrance des soldats. Son travail, à la fois symbolique et profondément humain, apporte une dimension émotionnelle forte à l’ensemble imaginé par Roger Séassal. Grâce à Janniot, la pierre devient récit : ses figures gravées incarnent la mémoire des combattants et donnent au monument une intensité qui marque encore aujourd’hui chaque visiteur.

Source : AM Nice, Photographie de l’Esprit de la Guerre, Alfred Janniot, 3 Fi 14-37

En 2018, lors de travaux de recherche sur le Monument aux morts de Nice, un aigle en bronze a été redécouvert dans une niche en hauteur où il reposait depuis 1928, invisible depuis près de 90 ans. Cette sculpture art déco, symbole de la ville, renferme un reliquaire contenant près de 2 000 plaques de soldats niçois morts pendant la Première Guerre mondiale, ainsi que quelques bijoux déposés par leurs familles. Nettoyé et étudié, l’aigle n’a pas été ouvert, par respect pour la volonté d’origine de préserver ces hommages scellés. Sa redécouverte offre un rappel puissant du rôle du monument : un lieu où la mémoire individuelle et collective se rejoignent, et où Nice continue de veiller sur ses fils tombés pour la France.

Source : Photo F.Blanc/SANCA, https://cultivez-vous.nice.fr

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